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Des bras, jambes, doigts et orteils longs, un corps mince, une hyperlaxité, une peau fine, un torse court, des problèmes cardiaques et ophtalmologiques... Le tableau clinique des personnes souffrant d'un syndrome de Marfan est en général assez typique. L'atteinte est plurisystémique et porte entre autres sur les systèmes musculosquelettique, pulmonaire, oculaire (myopie, subluxation du cristallin...) et cardio-vasculaire (dilatation de la racine de l'aorte, insuffisance mitrale...). La première menace qui pèse sur ces patients est donc celle d'une dissection aortique.La prévalence de la maladie est de l'ordre de 1/5.000, soit 2.200 patients en Belgique, mais largement méconnue, cette maladie est sous-diagnostiquée.Ce syndrome résulte d'une anomalie des tissus conjonctifs, engendrée par une mutation du gène FBN1 codant pour la protéine fibriline-1 sur le chromosome 15. Il s'agit d'une maladie autosomique dominante mais, dans 30% des cas, elle apparaît spontanément. La découverte du gène "Marfan" est assez récente (1991), malheureusement, la mutation qui le touche est extrêmement variable : à ce jour, 3.077 ont été répertoriées. Elles sont reprises dans une base de données en libre accès (Lienwww.umd.be/FBN1//Lien), très utile pour le diagnostic.Par ailleurs, certaines personnes typiquement Marfan n'ont pas de mutation (ou pas encore identifiée), alors que des porteurs de la mutation ne sont pas Marfan. Le spectre clinique et génétique de la maladie est donc assez large et varié, certaines personnes présentent peu d'atteintes quand l'espérance de vie de certaines autres est à peine de 16 mois. Actuellement, la cause de cette grande variabilité des atteintes et de leur intensité n'est pas bien comprise (voir ci-contre). " Il y a visiblement des gènes modificateurs qui soit protègent, soit amplifient", ajoute Romain Alderweireldt, trésorier de l'ABSM et papa d'un petit garçon atteint par le syndrome.Le diagnostic repose principalement sur les signes cliniques qui apparaissent en général progressivement. " Au fil des années, on va se rendre compte qu'un enfant semble avoir un habitus Marfan. Cela demande un bon coup d'oeil de la part des médecins", fait observer le Dr Douchka Peyra, nouvelle présidente de l'ABSM.Les critères cliniques de Gand permettent de poser le diagnostic. Ensuite, le patient est traité médicalement par sartans et/ou bêta-bloquants, et on assure un suivi de l'aorte."Poser un diagnostic dans l'enfance n'est facile. Or, les anomalies cardiaques doivent être traitées au plus vite pour freiner l'évolution de la dilatation de l'aorte. C'est la partie sur laquelle on peut agir médicalement, pour éviter ou repousser au maximum une chirurgie. Ma préoccupation est de former les médecins pour qu'il y ait moins d'errances diagnostiques", insiste la pédiatre."Aujourd'hui, le seuil opératoire tourne autour d'un diamètre de l'aorte de 4,5 cm. Mais cette limite est encore l'objet de discussions", précise Romain Alderweireldt. " Il faut une bonne relation de suivi entre le médecin et son patient. Le médecin doit être attentif à tous ces signes et pouvoir anticiper, tout en permettant au patient de choisir de manière éclairée le moment pour faire l'opération".Pour les femmes, il y a en outre le contexte particulier de la grossesse. Des guidelines sont développées au niveau européen pour accompagner la grossesse des femmes qui se savent Marfan. "Vu l'état hormonal, la grossesse est particulièrement à risque. On doit d'abord savoir si une patiente souffrant de Marfan peut avoir une grossesse", explique le Dr Peyra : "si ce diamètre >5 cm, elle doit être opérée avant. Cela donne lieu à de nombreux débats. Par ailleurs, beaucoup ne veulent pas transmettre cette maladie et préfèrent faire une fécondation in vitro. Ensuite, il y a des critères pour savoir si elle peut accoucher par voie basse. Enfin, après la naissance, la maman reste à risque pendant environ deux mois. C'est pourquoi certains déconseillent l'allaitement. Tout cela est assez lourd"."Il y a encore beaucoup de choses à faire pour soigner et encadrer cette maladie qu'il est essentiel de diagnostiquer le plus tôt possible", insiste Romain Alderweireldt. La conférence du 5 octobre prochain donnera quelques clés pour suivre et aider ces enfants.