Ou comment concevoir la médecine à travers le prisme de la vision intégrale... Le psychologue et philosophe Ken Wilber a été surnommé l' " Einstein de la conscience ". Pour nous apprendre à mieux appréhender les multiples dimensions de la réalité, il propose de concevoir
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L'idée est d'ouvrir notre connaissance, souvent limitée à nos perceptions de l'observable et du connu, au monde intérieur de l'individu, au monde relationnel et aux éléments de l'environnement. La vision se doit de tout concerner, n'oublier aucun élément : elle doit être " AQAL " en englobant " All Quadrants & All Levels ". Pour Ken Wilber, nulle part ailleurs le Modèle intégral n'est mieux applicable qu'en médecine, au point d'être adopté par de plus en plus de professionnels de la santé à travers le monde.Tentons la visualisation (figure ci-dessous) : en vision intégrale, notre médecine occidentale occupe le cadran du " ça " observable et factuel (en haut, à droite), avec ses bases expérimentales ( Evidence Based Medicine), les éléments de diagnostic et de traitement, la pharmacologie, la technologie, etc.Ken Wilber nous invite à élargir notre vision de la médecine à tout ce qui concerne l'individu (le quadrant du " Je " en haut à gauche) avec le conscient et le subconscient de chacun, ses convictions, ses craintes (acceptation ou refus de la maladie, de ses conséquences...), son passé et ses espoirs, mais aussi son attirance éventuelle vers les médecines non conventionnelles. La récente explosion d'intérêt pour les soins alternatifs démontre clairement, selon l'auteur, que l'attitude mentale, ces " états intérieurs ", joue un rôle dans l'apparition mais aussi la guérison de nombreuses maladies, même physiques. Ce quadrant représente donc un élément-clé de toute prise en charge médicale qui se veut complète.Aussi importants que soient ces facteurs subjectifs, ils sont cependant intimement liés aux valeurs et croyances culturelles et à une certaine vision du monde. Que ce soit avec attention et compassion ou au contraire avec mépris et dérision, la façon dont une culture considère une maladie particulière aura un impact profond sur la manière dont l'individu va affronter cette situation. Nous entrons dans le quadrant des relations (le " Nous " inférieur gauche), nous devons y placer les interactions telles que la relation entre le soignant et son patient, l'environnement familial soutenant ou non, l'aide recherchée auprès de groupes de patients (les Alcooliques Anonymes, l'Association de Hémophiles par exemple), Ainsi, des études démontrent de façon fiable que lorsque des patients cancéreux sont impliqués dans des groupes de soutien, ils vivent plus longtemps que ceux sans soutien culturel similaire.C'est dans ce quadrant également qu'il faut mentionner l'interprétation des questions éthiques (avortement, euthanasie, etc.) en relation avec les coutumes ou croyances du groupe social concerné.Mais la vision ne saurait être complète sans y intégrer le quadrant " Eux " (en bas à droite) qui concerne tous les facteurs sociaux, économiques et matériels qui ne sont presque jamais considérés dans le cadre de la maladie elle-même : un système social qui ne parvient pas à fournir suffisamment de nourriture ou d'hygiène peut vous tuer... Idem si une maladie infectieuse correctement diagnostiquée dans le quadrant 1 ne fait l'objet d'aucune mesure de prophylaxie dans le quadrant 4...les structures de soins (hôpitaux et maisons de repos et de soins, maisons médicales, hospitalisation à domicile...), les organismes sociaux (mutuelles, assurances, etc.), les facteurs économiques qui influencent les politiques de santé (accessibilité aux soins, vieillissement de la population, coût des traitements, ...), les aspects légaux (Loi " Droits des Patients " par exemple) entrent également dans le quadrant " environnemental ".Dans cette vision " holistique ", on comprend que le patient soit en droit d'attendre plus de respect de sa personne et de ses choix, une prise en compte de ses aspirations personnelles comme de son environnement culturel ou social, une participation plus active aux décisions thérapeutiques qui le concernent.La vision élargie du rôle de nos professions et de nos structures de santé conduit progressivement à une prise en charge plus globale et efficiente du patient à travers des trajets de soins et un accompagnement adéquat, qui tiennent compte de facteurs personnels du patient autant que d'aspects purement médicaux et/ou économiques.En route vers cette globalisation des soins idéale, depuis et vers le cabinet du MG en passant par le trajet hospitalier, la revalidation, les soins à domicile, etc. ?