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Un caryotype y était assez souvent ajouté auparavant, mais cette pratique a été abandonnée. "Les anomalies du caryotype sont extrêmement rares chez les personnes qui souhaitent entamer une transition médicale. Sur base de la littérature et de notre expertise clinique personnelle, un dépistage systématique de ces anomalies ne semble pas approprié. Un caryogramme peut néanmoins se révéler utile dans de rares cas, lorsque l'examen clinique, l'anamnèse ou l'analyse sanguine orientent vers une anomalie rare de la différenciation sexuelle (DSD)."La Dre Justine Defreyne [2] explique le déroulement du traitement: "Les patients se rendent d'abord chez le psychologue où ils reçoivent des informations sur le déroulement du traitement. Ils sont interrogés dans le même temps: le traitement hormonal correspond-il à leurs attentes, ou faut-il explorer d'autres options? Après cette séance exploratoire et informative, les patients viennent nous voir en tant qu'endocrinologues. Nous leur remettons une ordonnance pour leur traitement hormonal, qu'ils peuvent simplement se procurer dans leur pharmacie."Des lignes directrices claires existent pour l'instauration d'un traitement hormonal virilisant ou féminisant. En ce qui concerne les produits utilisés à cette fin et leur dosage, une expérience importante avait déjà été acquise dans d'autres indications, en dehors du traitement de la dysphorie de genre. De plus en plus de données spécifiques au transgenrisme sont devenues disponibles au fil du temps. L'un des principaux points d'attention liés à l'hormonothérapie d'affirmation du genre est le risque de développer des effets indésirables plutôt rares mais graves. Il faut penser tout particulièrement aux événements thromboemboliques. Il ne s'agit pas seulement des effets secondaires redoutés de l'oestrogénothérapie: en raison de son effet stimulant sur l'hématocrite, la testostérone peut également favoriser la formation de caillots. "Nous devons agir ici non seulement en tant qu'endocrinologues, mais aussi en tant qu'internistes généraux", déclare le Pr T'Sjoen. Le patient est examiné dans une perspective large, en tenant compte de ses antécédents familiaux et médicaux, ainsi que des facteurs liés à son mode de vie. Des éléments tels que le tabagisme, les apnées du sommeil ou l'obésité peuvent par exemple favoriser l'érythrocytose induite par la testostérone. Dans le cadre d'un traitement hormonal visant à la féminisation, la production de testostérone endogène doit d'abord être réduite. L'arrêt complet de la production de testostérone endogène ne peut être obtenu avec des doses sûres d'oestrogènes. Auparavant, la production de testostérone était stoppée par l'acétate de cyprotérone (Androcur®), mais un remboursement a été accordé entre-temps pour la triptoréline (Decapeptyl®) (lire également l'article précédent: 'Le traitement hormonal chez l'enfant et l'adolescent'). La triptoréline est administrée par injection, souvent tous les trois mois. Elle peut être administrée par le médecin généraliste ou l'infirmier à domicile. "Nous préférons la triptoréline à l'acétate de cyprotérone, qui peut potentiellement déclencher des symptômes dépressifs", ajoute le Pr T'Sjoen. "De plus, la littérature relative à l'acétate de cyprotérone mentionne un risque légèrement accru de méningiome en cas d'utilisation à long terme. Ce dernier point a été décisif dans l'abandon de l'acétate de cyprotérone. Par ailleurs, l'EMA recommande de limiter la posologie de ce médicament à 10 mg/jour pendant deux ans au maximum. Aux États-Unis, la spironolactone est largement utilisée comme anti-androgène. D'après notre expérience, son effet sur les taux de testostérone est variable: chez certains individus, nous constatons une diminution insuffisante du taux de testostérone. En outre, l'effet diurétique du médicament peut également provoquer des symptômes gênants."Parallèlement, des oestrogènes sont administrés sous forme de comprimés, de patchs ou de gel. Il n'existe pas de préparations à libération prolongée en Belgique. Les comprimés et le gel sont à utiliser quotidiennement, alors que le patch est à remplacer tous les trois jours. La dose appliquée est indiquée dans un protocole de base, mais elle peut être adaptée au profil et aux souhaits de la personne. En tenant compte de son contexte social, on procède parfois un peu plus lentement, ou avec des doses plus faibles. En ce qui concerne le traitement hormonal féminisant stricto sensu, un risque accru de thrombose constitue en principe une contre-indication. Bien entendu, le processus de décision partagée est systématique lorsque l'initiation d'une thérapie hormonale est souhaitée. On s'efforce alors au maximum de limiter les autres facteurs de risque par une perte de poids et l'arrêt du tabagisme. "Nous travaillons toujours en concertation avec le service d'hématologie lorsque le patient se caractérise par un profil de risque plus complexe ou une coagulopathie."Les effets des traitements féminisants (développement des seins, modification des contours du corps, diminution de la pilosité) ne se produisent pas du jour au lendemain. "Le mot qui revient le plus souvent lors de nos consultations est 'patience'", indique Guy T'Sjoen. "Les personnes ont parfois tendance à prendre des hormones féminisantes à des doses légèrement supérieures à celles qui leur ont été prescrites. Il faut les en prémunir et leur faire comprendre que leur processus de féminisation est comparable à une seconde puberté. Cela prend du temps."Les hormones féminisantes ne font pas disparaître la barbe. Pour cela, l'épilation au laser ou, le cas échéant, l'épilation électrique sont appropriées. Malgré le traitement hormonal, la voix se maintient également dans le registre masculin. Ce problème peut être résolu par de la logopédie ou, éventuellement, par une chirurgie de la voix. "Le traitement par testostérone réussit à freiner la production de gonadotrophines chez la plupart des hommes transgenres. Il n'est donc pas nécessaire d'associer un second médicament comme la triptoréline pour arrêter la production endogène", explique le Dr Jeroen Vervalcke [2]. "Parfois, nous observons que le contrôle du cycle menstruel par l'hypophyse est préservé. Raison pour laquelle nous informons les hommes transgenres que le traitement à la testostérone, en soi, n'empêche pas la grossesse et que des mesures contraceptives supplémentaires sont donc nécessaires si la personne est sexuellement active. Des progestatifs peuvent également être utilisés pour accélérer la suppression des menstruations."La testostérone est disponible sous forme de gel et d'injections d'esters à longue durée d'action (administration toutes les 12 semaines) ou à courte durée d'action (administration toutes les deux à trois semaines). "Il existe une différence entre les préparations en termes de suppression des règles", explique la Dre Defreyne. "Avec les esters à courte durée d'action, les menstruations s'arrêtent souvent assez rapidement, tandis que cela peut prendre plusieurs mois avec les esters à longue durée d'action. Dans certains cas, la suppression n'est observée qu'au bout d'un an. Après 18 mois, les menstruations disparaissent avec n'importe quelle préparation à base de testostérone. Si nous combinons la testostérone avec des progestatifs, nous suggérons d'arrêter ces derniers après trois à six mois. Les menstruations seront alors généralement supprimées."La testostérone est un médicament très efficace, et les premiers signes de virilisation sont souvent observés rapidement. Le premier changement est la baisse de la fréquence vocale, qui est suffisamment obtenu après six semaines à trois mois. Cependant, les mesures montrent une diminution insuffisante de la fréquence vocale chez deux hommes sur dix. La logopédie peut s'avérer utile chez ces hommes. En outre, sous l'influence du traitement par testostérone, la masse musculaire augmentera et la masse graisseuse diminuera, tandis que les poils prendront une forme masculine et que la barbe poussera. Ici encore, la patience est de mise. L'hormonothérapie n'a que peu ou pas d'effet sur certaines caractéristiques physiques, comme la présence de seins. Les personnes qui le souhaitent peuvent bénéficier d'une ablation chirurgicale des seins dans le cadre du processus de transition. Les effets secondaires de la testostérone comprennent une acné légère à sévère et, avec le temps, le développement d'une alopécie androgénétique. Comme indiqué précédemment, l'hématocrite est un paramètre à surveiller. Trois mois après le début du traitement virilisant, l'hématocrite peut déjà se situer dans les valeurs de référence masculines. Il sera surveillé tous les trois à six mois au début, puis tous les ans si le patient se trouve à la limite supérieure du taux normal - sinon, tous les trois ans. "Nous devenons très vigilants lorsque l'hématocrite dépasse 54%", explique le Pr T'Sjoen. "Dans ce cas, nous réduisons la dose de testostérone ou, le cas échéant, nous motivons le patient pour qu'il arrête de fumer, qu'il perde du poids et/ou qu'il suive un traitement au laboratoire du sommeil. Dans de rares cas, une phlébotomie thérapeutique peut également s'avérer nécessaire.""Dans un contexte stable, l'hématocrite n'augmente pas après un an de traitement par testostérone", ajoute la Dre Defreyne. "Mais il faut rester vigilant, car un élément du contexte peut changer, comme le tabagisme ou un début de SAOS."Les anciennes lignes directrices faisaient référence à une perturbation des tests hépatiques lors d'un traitement par testostérone. Cet effet indésirable ne s'observe plus avec les préparations actuelles. Tout au plus, de légères anomalies des tests hépatiques sont mesurées chez une minorité de personnes traitées, et elles disparaissent lors d'un contrôle ultérieur. "Nous n'avons jamais dû interrompre un traitement par testostérone en raison de problèmes hépatiques", rassure le Pr T'Sjoen.