Aujourd'hui, les voyages lointains évoquent souvent les maladies infectieuses et les vaccins associés. Mais d'autres maux typiques frappent de nombreux voyageurs. Ils sont la plupart du temps gênants, mais peuvent s'avérer plus graves dans certains cas. Le Pr Willy Peetermans (Médecine du voyage, UZ Leuven) en dresse un aperçu.
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Un quart à un tiers des voyageurs souffre de diarrhée des voyageurs. On distingue deux formes : modérée et grave. La forme modérée consiste en la production de selles non moulées associée à des crampes modérées. On ne note ni fièvre, ni sang ou mucus dans les selles. La forme plus rare et sévère (dysenterie) est une diarrhée très inflammatoire avec de la fièvre, du sang et de l'interférence de mucus et des crampes fortes.La majorité des patients guérissent spontanément dans les 1 à 3 jours, en particulier en cas de diarrhée modérée. " Mais la forme la plus grave peut durer plus longtemps et dans certains cas également la forme modérée peut évoluer vers la forme grave. Pensez également à une éventuelle infection par Giardia lamblia ou à une dysenterie amibienne ", poursuit le Pr Peeter Mans.En raison d'une période d'incubation très courte, les voyageurs reçoivent à l'avance des instructions pour se soigner eux-mêmes. Récemment, l'utilisation d'antibiotiques a été limitée à la forme sévère. Des études ont ainsi constaté que la flore intestinale d'une bonne partie d'Européens de retour de vacances contenait des entérobactéries productrices de ß-lactamase à spectre étendu (EBLSE). 1,2 Le nombre de porteurs était plus important chez les personnes souffrant de diarrhée, mais encore plus après un traitement par antibiotiques. " Le nombre de porteurs de germes résistants diminue de moitié après un mois, et chez certains patients, ils sont encore présents 3 à 6 mois plus tard. Il est donc important de limiter un accès aussi libre aux antibiotiques pour les voyageurs. "En cas de diarrhée modérée, le traitement sera donc symptomatique. L'auto-traitement consiste en une bonne hydratation et un apport de sels minéraux, ainsi que du lopéramide à raison, pour commencer, de maximum 1 à 4 comprimés par jour.En cas de diarrhée sévère, des antibiotiques sont prescrits et la personne peut se les procurer pour un auto-traitement en cas de voyage de longue durée. " Actuellement, les quinolones sont remplacées par l'azithromycine, du fait de la résistance aux fluoroquinolones en l'Asie du Sud et du Sud-est. En Afrique et en Amérique latine, les quinolones sont souvent encore efficaces, mais par facilité, nous prescrivons également l'azithromycine, qui est sans danger pour les enfants. "En cas de diarrhée persistante après le retour de l'étranger, il faut consulter un médecin.Les infections cutanées sont un problème fréquent et sous-estimé chez les voyageurs qui effectuent de longs trajets (par ex. pour un trek). " Cela débute généralement par de petites lésions mal soignées, comme une piqure d'insecte qui démange, que l'on gratte et qui se surinfecte, ou une petite blessure mal traitée. " Les touristes marchent souvent pieds nus ou en chaussures ouvertes dans un environnement humide, sale et chaud.Il est important d'effectuer une désinfection correcte par un gel ou une pommade appliqués sur la plaie, couverts ensuite d'un pansement de gaze stérile.Pour les personnes qui réagissent fortement aux piqures d'insectes, une pommade à base de cortisone est indiquée. Les antihistaminiques sont également une option, mais provoquent parfois des effets secondaires. En cas de surinfection bactérienne après une piqûre d'insecte ou une blessure, l'antibiotique s'impose après consultation d'un médecin sur place.Lorsqu'ils traversent plusieurs (au moins cinq) fuseaux horaires, les voyageurs peuvent souffrir de troubles du sommeil et alimentaires, ainsi que d'une diminution de la vigilance.La différence entre les trajets vers l'Ouest ou vers l'Est est claire. Avec les premiers, la journée est allongée : on se sent fatigué et on se réveille trop tôt. " La difficulté est de rester éveillé le jour d'arrivée, et de s'adapter à la lumière et au rythme locaux. Une faible dose de mélatonine (0,5-1mg) peut être prise si l'on reste éveillé jusqu'à 2 ou 3 heures du matin. "Lors d'un voyage vers l'Est, la journée est raccourcie. Généralement, ils sont moins bien supportés que les voyages vers l'Ouest. C'est pourquoi il est important de penser à s'exposer à la lumière au bon moment. La prise d'un somnifère à courte durée d'action comme le zolpidem est recommandée, mais n'aura aucun effet sur le règlage de l'horloge biologique interne. La prise d'une dose plus élevée de mélatonine (2-5 mg) juste avant le coucher est également possible.Le mal des transports est causé par un conflit entre les informations sensorielles transmises par le système vestibulaire, les yeux et/ou les muscles (proprioception). Cela peut provoquer des nausées, des vomissements, de la transpiration et de la pâleur.Les voyageurs doivent s'installer à l'endroit le plus stable (à l'avant de la voiture ou du car, au milieu de l'avion...). En ce qui concerne les médicaments, les antihistaminiques sont recommandés, mais aucune preuve scientifique n'assure leur efficacité. De la dompéridone peut aussi être prescrite, mais son effet est incertain." Le mal des montagnes fait régulièrement l'objet de discussions. D'autant que les voyages au Pérou et dans l'Himalaya en particulier ont le vent en poupe. " La montée en altitude se produit généralement rapidement : en quelques jours, il faut passer du niveau de la mer à une altitude de plus de 3000 m. A cette altitude, ce sont généralement des symptômes bénins qui se manifestent. Un tiers des personnes souffre le plus souvent, entre autres, d'insomnie et de maux de tête. Au-dessus de 4500 à 5000 m, la moitié des voyageurs se sent mal, et peut souffrir de problèmes graves dus à l'altitude, comme un oedème pulmonaire ou cérébral.Le conseil est de monter lentement en altitude : moins de 500 m par jour dès 2000-2500 m. Chose que ne prévoient pas les voyages organisés. "Il est impossible de prévoir qui va en souffrir. Une bonne condition physique, par exemple, ne protège en rien contre le mal des montagnes, mais le risque est plus grand chez les personnes qui en ont déjà souffert."" Les voyageurs doivent écouter les guides. La prévention recommandée est l'acétazolamide: 2x125mg ou 2X250mg par jour dès que l'on doit passer une nuit au-dessus de 2500 m. Le traitement préventif sera pris en continu durant 3 jours, jusqu'à ce que l'on atteigne l'altitude désirée. En raison de son effet diurétique, les mictions sont plus fréquentes. Il peut également provoquer des picotements ou une modification du goût. D'un autre côté, il améliore le sommeil. Il s'agit du médicament le plus efficace pour prévenir le mal des montagnes. "Références :Kantele et al. Clin Infect Dis 2015 ; 60 : 837-846.Acilla et al. BMC Public Health 2014 ; 14 : 410.