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Le visiteur est accueilli par le portrait en pied du Roi Albert et de la Reine Fabiola, portraits en noir et blanc bien sûr de Dirk Braeckman : " tableaux " en dégradé de gris, mais pleins d'humanité. Au petit salon, la commissaire a réuni une peuplade de statues de glorieux oubliés Schaerbeekois du 19e, issues des collections, qu'elle met en regard de l'oeuvre vidéo de David Claerbout dans le grand salon cette fois : partant d'une photo de classe globale des années 30, le vidéaste zoome chaque fois lentement sur le visage d'un des élèves, lequel devient un paysage familier, effaçant au passage la distance et le temps qui nous séparent de ces jeunes garçons endimanchés.Dans la salle à manger, un jeune tireur à l'arc du plasticien multiforme Hans Op de Beeck voisine avec un tableau 19e d'un enfant, le frère de l'artiste qui le dépeint, Charles Goethals, dans la lignée d'un Stevens, et la belle photo d'un enfant à la tête penchée, genre de Michael Borremans photographique, de Tom Callemin.Deux artistes ont travaillé in situ sur le thème de l'autoportrait : Evelyne De Behr en présente un morcelé d'ellemême, de ce qu'elle est dans un cabinet de curiosité composé de fragments réunis sur les étagères de la bibliothèque et qui renvoie au livre Une chambre à soi de Virginia Woolf. L'autre est l'oeuvre de Juan Canizares qui propose une sorte de jeu de piste dans une chambre au décor textile suranné, dans laquelle il a placé des chiffres correspondant aux grandes étapes émotionnelles de sa vie, une trentaine, comme la mort de son père.Sur le palier, trois portraits de chats ; l'un signé Toulouse-Lautrec qui le place dans une lithographie de May Belfort issue des collections du musée, un autre dans un polaroid de Michel Auder, mise en abîme d'une femme au chat devant une autre femme au chat que l'on croirait signé Bernard Buffet : une photographie " tirée " de la collection du Musée du chat de Madame Baronian. Un triptyque clôt par une photo d'un petit chat courant dans une cour, simple et évidente, signée Bernard Plossu.Le couple est symbolisé dans une des chambres par les époux Dailly, bourgmestre de la commune de Schaerbeek, par Adèle Kindt au milieu du 19e siècle, et les ampoules blanche et noire et jumelles pendues au plafond, l'une réelle et lumineuse et l'autre opaque et en résine de David Bestué... Très yin et yang.Dans le dressing, d'autres portraits d'enfants comme celui ancien, on pense à Renoir, d'une petite fille de Fritz Hickman mis en regard du "Vue de l'esprit", sorte de dessin enfantin contemporain signé Maxence Mathieu. Une autre chambre propose notamment une étonnante photographie d'arbre, qui ressemble à un sexe féminin dans sa présentation sous forme de sorte de test de Rorschach de Maria Degrève, en face du portrait de femme de Josse Impens voici deux siècles, tout aussi sensuel bien que nettement moins suggestif !Tout n'est pas toujours complètement convaincant, notamment au niveau contemporain dans la dernière pièce, mis à part une série de douze photographies de Tom Callemin intitulée 12 time falling, portrait d'un homme sur le point de chuté. Au contraire des oeuvres anciennes, notamment la présentation d'un étonnant plâtre de Jef Lambeaux, Le génie méconnu, portrait d'un violoniste torturé par la création (ce serait en fait le sien paraît-il....), et une huile sur carton de Georges Fichefet intitulé aux champs qui montre un couple de paysans tirant une charrue, oeuvre qui évoque un Constantin Meunier... aux champs !Reste que cette petite exposition séduit par ses mises en relation, son écrin néo-flamand dépoussiéré, ses textes lumineux et surtout éclairants, ce qui manque souvent dans les expositions qui mettent en scène la création contemporaine.Bernard Roisin