Le consensus politique est suffisamment rare que pour être souligné: le gouvernement Trump va interdire des colorants synthétiques issus du pétrole utilisés dans des milliers d'aliments, une mesure que soutiennent les experts sanitaires et déjà entamée sous Biden. Ces additifs sont aussi utilisés en Europe, mais avec modération.
La FDA "supprime de facto tous les colorants alimentaires dérivés du pétrole aux États-Unis", a annoncé Marty Makary (photo), nouveau directeur de l'Administration, lors d'une conférence de presse ce mardi. Concrètement, huit colorants synthétiques, tous dérivés du pétrole et accusés d'effets délétères sur la santé, vont être interdits d'ici fin 2026.
"Au cours des 50 dernières années, les enfants américains ont de plus en plus vécu dans une soupe toxique de produits chimiques artificiels", avait déclaré Makary un peu plus tôt, citant des études liant ces additifs à l'hyperactivité, le diabète ou encore le cancer.
Fin septembre dernier, l'État de Californie avait déjà interdit, à l'échéance du 31 décembre 2027, le recours à six additifs artificiels (Blue 1 et 2, Green 3, Red 40 et Yellow 5 et 6) dans ses écoles publiques. Motif: suspicion d'effets neurocomportementaux engendrés par ces colorants chez les enfants, sur base d'une étude (controversée) de son Agence de protection de l'environnement (CalEPA).
L'érythrosine déjà interdite sous Biden
Mi-janvier dernier, la précédente administration démocrate avait déjà interdit le 'Red n°3', un colorant lui aussi issu du pétrole à base d'iode, connu depuis plus de trois décennies pour provoquer des cancers chez le rat mâle. L'interdiction américaine s'appuie sur la 'clause Delaney', qui interdit l'autorisation d'un additif alimentaire s'il est prouvé qu'il peut induire un cancer chez l'homme ou l'animal.
Selon l'ONG américaine 'The Environmental Working Group' (EWG), qui rassemble des experts en produits toxiques et polluants et étudie les pratiques agricoles et industrielles qui impactent la santé et l'environnement, le 'Red n°3' serait utilisé, à l'heure actuelle, dans 3.000 produits alimentaires commercialisés aux États-Unis. Il est par contre interdit dans les cosmétiques et les médicaments topiques depuis 35 ans (notez le paradoxe: on ne peut plus le mettre sur sa peau depuis 1990, mais on pouvait toujours l'ingérer jusqu'à début 2025...).
Chez nous, ce colorant rouge de synthèse (E127 ou érythrosine) est uniquement autorisé pour colorer les cerises en conserve et cerises 'cocktails', ainsi que pour certaines gélules de médicament selon l'association française de consommateurs UFC - Que Choisir?. Des doutes subsistent sur ses risques cancérogènes, notamment thyroïdiens, et son risque de TDAH chez l'enfant, mais les autorités sanitaires européennes font un distingo entre physiologie humaine et des muridés.
'Allura red' suspecté dans le TDAH...
Parmi les autres colorants bientôt interdits outre-Atlantique, le rouge 'Red n°40' (dit aussi 'Allura red', E129 en Europe) et les jaunes 'Yellow n°5' (E102) et 'Yellow n°6' (E110). Selon le président du 'Center for Science in the Public Interest' (CSPI), une association de défense des consommateurs basée à Washington, ce sont là des additifs parmi les plus souvent utilisés par l'industrie agroalimentaire pour les bonbons, céréales, sauces, boissons et chewing-gums.
Quel est leur sort de ce côté-ci de l'Atlantique? L'E129 est aussi un colorant rouge, dit "azoïque", utilisé chez nous dans les produits industriels ultra-transformés de type yaourts, fromages, desserts et glaces, poissons fumés, chutneys, confitures et charcuteries... La mention " Peut avoir des effets indésirables sur l'activité et l'attention chez l'enfant " est obligatoire sur les denrées alimentaires qui en contiennent.
Si les réactions allergiques à cet additif ne sont pas indubitablement prouvées, une étude de Donna McCann et al. parue en 2007, dite "étude de Southampton", suggérait un lien avec l'hyperactivité chez l'enfant quand l'E129 est associé au benzoate de sodium. Après examen, l'Efsa (Autorité européenne de sécurité des aliments) n'avait cependant pas jugé judicieux d'abaisser sa DJA, ni celle du benzoate.
... et carcinogène pour le côlon?
Beaucoup plus près de nous, une étude parue en octobre dernier dans la revue Carcinogenesis s'interrogeait sur les liens entre les interactions du xénobiotique rouge Allura avec des facteurs clés de la carcinogenèse colorectale comme les médiateurs inflammatoires, le microbiome et les lésions ADN.
"Bien qu'aucune agence gouvernementale ne classe Allura Red AC comme cancérogène, son interaction avec les principaux gardiens de la cancérogenèse le rend suspect et digne d'une étude moléculaire plus approfondie", soulignaient alors les chercheurs. "L'objectif de cette étude est d'encourager la recherche sur l'impact des colorants alimentaires synthétiques sur la santé du côlon."
Quant aux colorants jaunes, l'E102 est mieux connu sous nos latitudes sous le nom de 'tartrazine' et l'E110 est dit 'jaune soleil' ou 'jaune orangé S' (S = soleil). Tous deux ont aussi fait l'objet de l'étude de Southampton.
L'E110 est interdit dans les produits bio, sa DJA a été revue à la baisse et l'Anses le soupçonne, depuis 2021, d'être un perturbateur endocrinien. Les aliments qui y ont recours doivent aussi porter la mention: "Peut avoir des effets indésirables sur l'activité et l'attention chez les enfants".
C.V.
La FDA "supprime de facto tous les colorants alimentaires dérivés du pétrole aux États-Unis", a annoncé Marty Makary (photo), nouveau directeur de l'Administration, lors d'une conférence de presse ce mardi. Concrètement, huit colorants synthétiques, tous dérivés du pétrole et accusés d'effets délétères sur la santé, vont être interdits d'ici fin 2026."Au cours des 50 dernières années, les enfants américains ont de plus en plus vécu dans une soupe toxique de produits chimiques artificiels", avait déclaré Makary un peu plus tôt, citant des études liant ces additifs à l'hyperactivité, le diabète ou encore le cancer.Fin septembre dernier, l'État de Californie avait déjà interdit, à l'échéance du 31 décembre 2027, le recours à six additifs artificiels (Blue 1 et 2, Green 3, Red 40 et Yellow 5 et 6) dans ses écoles publiques. Motif: suspicion d'effets neurocomportementaux engendrés par ces colorants chez les enfants, sur base d'une étude (controversée) de son Agence de protection de l'environnement (CalEPA). Mi-janvier dernier, la précédente administration démocrate avait déjà interdit le 'Red n°3', un colorant lui aussi issu du pétrole à base d'iode, connu depuis plus de trois décennies pour provoquer des cancers chez le rat mâle. L'interdiction américaine s'appuie sur la 'clause Delaney', qui interdit l'autorisation d'un additif alimentaire s'il est prouvé qu'il peut induire un cancer chez l'homme ou l'animal.Selon l'ONG américaine 'The Environmental Working Group' (EWG), qui rassemble des experts en produits toxiques et polluants et étudie les pratiques agricoles et industrielles qui impactent la santé et l'environnement, le 'Red n°3' serait utilisé, à l'heure actuelle, dans 3.000 produits alimentaires commercialisés aux États-Unis. Il est par contre interdit dans les cosmétiques et les médicaments topiques depuis 35 ans (notez le paradoxe: on ne peut plus le mettre sur sa peau depuis 1990, mais on pouvait toujours l'ingérer jusqu'à début 2025...).Chez nous, ce colorant rouge de synthèse (E127 ou érythrosine) est uniquement autorisé pour colorer les cerises en conserve et cerises 'cocktails', ainsi que pour certaines gélules de médicament selon l'association française de consommateurs UFC - Que Choisir?. Des doutes subsistent sur ses risques cancérogènes, notamment thyroïdiens, et son risque de TDAH chez l'enfant, mais les autorités sanitaires européennes font un distingo entre physiologie humaine et des muridés.Parmi les autres colorants bientôt interdits outre-Atlantique, le rouge 'Red n°40' (dit aussi 'Allura red', E129 en Europe) et les jaunes 'Yellow n°5' (E102) et 'Yellow n°6' (E110). Selon le président du 'Center for Science in the Public Interest' (CSPI), une association de défense des consommateurs basée à Washington, ce sont là des additifs parmi les plus souvent utilisés par l'industrie agroalimentaire pour les bonbons, céréales, sauces, boissons et chewing-gums. Quel est leur sort de ce côté-ci de l'Atlantique? L'E129 est aussi un colorant rouge, dit "azoïque", utilisé chez nous dans les produits industriels ultra-transformés de type yaourts, fromages, desserts et glaces, poissons fumés, chutneys, confitures et charcuteries... La mention " Peut avoir des effets indésirables sur l'activité et l'attention chez l'enfant " est obligatoire sur les denrées alimentaires qui en contiennent. Si les réactions allergiques à cet additif ne sont pas indubitablement prouvées, une étude de Donna McCann et al. parue en 2007, dite "étude de Southampton", suggérait un lien avec l'hyperactivité chez l'enfant quand l'E129 est associé au benzoate de sodium. Après examen, l'Efsa (Autorité européenne de sécurité des aliments) n'avait cependant pas jugé judicieux d'abaisser sa DJA, ni celle du benzoate.Beaucoup plus près de nous, une étude parue en octobre dernier dans la revue Carcinogenesis s'interrogeait sur les liens entre les interactions du xénobiotique rouge Allura avec des facteurs clés de la carcinogenèse colorectale comme les médiateurs inflammatoires, le microbiome et les lésions ADN."Bien qu'aucune agence gouvernementale ne classe Allura Red AC comme cancérogène, son interaction avec les principaux gardiens de la cancérogenèse le rend suspect et digne d'une étude moléculaire plus approfondie", soulignaient alors les chercheurs. "L'objectif de cette étude est d'encourager la recherche sur l'impact des colorants alimentaires synthétiques sur la santé du côlon."Quant aux colorants jaunes, l'E102 est mieux connu sous nos latitudes sous le nom de 'tartrazine' et l'E110 est dit 'jaune soleil' ou 'jaune orangé S' (S = soleil). Tous deux ont aussi fait l'objet de l'étude de Southampton. L'E110 est interdit dans les produits bio, sa DJA a été revue à la baisse et l'Anses le soupçonne, depuis 2021, d'être un perturbateur endocrinien. Les aliments qui y ont recours doivent aussi porter la mention: "Peut avoir des effets indésirables sur l'activité et l'attention chez les enfants".C.V.