Un sujet qui est mis en lumière à travers une pièce de théâtre : Cinglée. Un huit clos écrit et mis en scène par Céline Delbecq, qui brise le silence sur les femmes massacrées dans notre pays parce qu'elles étaient des femmes.

C'est l'histoire de Martha Mendes, une émigrée portugaise de 58 ans vivant en Belgique, qui découvre un jour par hasard dans le journal, le meurtre d'une femme. Commence alors l'obsession qu'il n'y en ait pas une de plus et elle épluche tous les jours des dizaines de journaux. Elle veut briser le silence et décide d'écrire une centaine de lettres qui s'adressent au roi, à l'Union Européenne, à la Ligue des droits de l'homme et à Charles Michel en personne. Elle ira même jusqu'à déposer plainte à la Commission européenne. Une plainte classée sans suite. Et pour que ces personnes ne tombent pas dans l'oubli, elle va créer une liste ; des noms réels trouvés sur un site listant les femmes mortes en Belgique. Sa mission tourne à l'obsession dévorante...

En Belgique, une femme est tuée tous les huit jours. En France, tous les trois jours.

Les féminicides et les violences conjugales et familiales existent partout dans le monde sous différentes formes. Selon l'ONU, une femme sur trois dans le monde aurait subi des violences physiques ou sexuelles une fois dans sa vie, 200 millions de femmes ont subi des mutilations génitales féminines, 71% de toutes les victimes de la traite des êtres humains dans le monde sont des femmes et des filles. Et une femme sur deux dans le monde a été tuée par son partenaire.

C'est en 1992 qu'apparaît pour la première fois le terme de féminicide, dans le livre de Diana Russel Féminicide, the politics of women killing. Mais il faudra attendre plusieurs années pour faire exister ce concept et le combattre. Un terme qui s'est fait connaître de l'Amérique Latine jusqu'à nous, par Marcela Lagarde, une Mexicaine à l'initiative d'une commission spéciale du Parlement au Mexique en 2003. Suivront ensuite en 2015, des manifestations en Argentine où plus de 300.000 personnes ont défilés dans la rue. Elles ont pour slogan " ni una menos " (pas une de moins) qui fait référence au poème de la Mexicaine Suzana Chavez, assassinée en 2011 en raison de son combat contre les meurtres des femmes à Ciudad Juarez.

En Belgique

La loi Lizin votée en 1998 pénalise les violences conjugales et met l'accent sur la problématique sociétale. Presque 20 ans plus tard, en 2016, la Belgique ratifie la convention d'Istanbul, un texte du Conseil de l'Europe. Notre pays est tenu de mettre en application les " 4 P " : la prévention, la prise en charge, la poursuite et les politiques intégrées. " Or, le pays est en infraction à ce niveau, car trop peu de choses sont faites par rapport aux obligations. Et rien ne semble bouger énormément dans notre pays malgré les faits récurrents ", soutient Sylvie Lausberg, présidente du Conseil des femmes francophones de Belgique : " Il existe différents types de féminicides. L'OMS en définit quatre : les meurtres par conjoint, les meurtres d'honneur, ceux liés à la dote et les viols suivis de meurtres par des non partenaires. Dans notre pays, la majorité sont des femmes tuées par leur mari, leur compagnon ou ex-compagnon, souvent dans le cadre d'une rupture. Nous n'avons pas de chiffres officiels dans notre pays, car la Belgique ne remplit pas l'obligation de l'article 11 de la Convention, qui demande des statistiques ventilées par sexe sur toutes les formes de violences."

De la prévention avant tout

" Les conséquences de ces violences coûtent énormément à la société, en vies humaines brisées mais aussi sur le plan budgétaire. Des centaines de millions d'euros sont dépensés en justice, en santé ou encore dans le monde du travail où les conséquences des violences envers les femmes se chiffrent à 288 millions d'euros par an1. Il faut de la prévention avant tout. Nous devons absolument travailler sur le PAN (Le plan d'action nationale de lutte contre toutes les formes de violence basée sur le genre). Le nouveau plan 2020-2025 prévoit un budget sur cinq ans, mais nous n'avons pas encore d'évaluation du plan précédent... Il est plus que temps de mettre en oeuvre des politiques concertées et volontaristes, et pas seulement au niveau francophone où le dossier est pris à bras le corps en conférence interministérielle. C'est un problème national ! Nous ne pouvons pas éradiquer totalement le féminicide, mais nous pouvons le réduire car ce phénomène est inadmissible. "

Le PAN reprend des objectifs qui mettent en pratique la Convention d'Istanbul. Certaines mesures ont été concrétisées, comme le renforcement d'une ligne téléphonique " Écoute violences conjugales " ouverte 24h/24 (0800 30 030, mais qui bascule sur la ligne générale des urgences après les heures de bureau...) et une autre pour les violences sexuelles ainsi que quelques maisons d'accueil spécialisées2. Cependant, rien n'est dit sur le budget consacré aux objectifs.

Les médecins généralistes ont un rôle à jouer

" La première ligne a un rôle à jouer dans la détection et l'aide bien évidemment ", ajoute Sylvie Lausberg. " Il existe plusieurs organismes qui proposent d'ailleurs des formations pour le corps médical, comme la SSMG ou le collectif contre les violences familiales et l'exclusion. "

1. https://igvm-iefh.belgium.be/fr/publications/enquete_nationale_sur_limpact_de_la_violence_entre_partenaires_sur_le_travail_les

2. https://www.cvfe.be/services/nos-formations/je-suis-un-e-professionnel-le

Formation à la SSMG sur les violences conjugales et familiales

A fin d'orienter le médecin généraliste face à la suspicion de violence conjugale et/ou familiale chez ses patientes, la SSMG propose une formation de deux heures qui permet de la diagnostiquer et d'aider les victimes. Dr Thierry Van Der Schueren (formateur à la SSMG - médecine générale et préventive): " Cette formation est destinée à identifier plus rapidement les violences conjugales et familiales, à soutenir adéquatement la victime à son rythme et propose des aides adaptées dans le réseau de soins. "

Ce module créé il y a deux ans au sein de la SSMG répond à un réel besoin car cette problématique n'est pas abordée dans la formation de base. " Lorsque nous avons créé cette formation, nous avons rencontré deux problématiques : Les victimes pensent que les violences ne sont pas des compétences de leur MG et elles craignent que le secret médical ne soit pas total de la part du médecin de famille. Nous avons dès lors établi des recommandations de bonnes pratiques pour que le médecin apprenne à diagnostiquer cette violence et qu'il s'affiche comme une personne qui peut entendre ce genre de confidence et qui peut aider la victime comme elle en a besoin. Dans la formation, nous les invitons à signaler via affiches et folders que c'est dans leurs compétences et de rappeler aux victimes que leurs propos et lésions sont couvertes par le secret professionnel le plus strict. "

Composée d'une partie théorique, d'une séance interactive questions/réponses et d'un jeu de rôle, cette formation permet de se créer un réseau pour aider à la prise en charge des patientes victimes de violence ; aussi bien au niveau de la sécurité que du suivi psychologique, médical et judiciaire qui pourraient en découler.

" Ce cours permet d'apporter des réponses et montre les étapes à suivre : quelles sont les priorités, les éléments à prendre en charge pour avoir une base pratique et ne pas se sentir démuni face à cette situation. "

https://www.ssmg.be/courses/les-violences-conjugales-et-familiales/

Un sujet qui est mis en lumière à travers une pièce de théâtre : Cinglée. Un huit clos écrit et mis en scène par Céline Delbecq, qui brise le silence sur les femmes massacrées dans notre pays parce qu'elles étaient des femmes.C'est l'histoire de Martha Mendes, une émigrée portugaise de 58 ans vivant en Belgique, qui découvre un jour par hasard dans le journal, le meurtre d'une femme. Commence alors l'obsession qu'il n'y en ait pas une de plus et elle épluche tous les jours des dizaines de journaux. Elle veut briser le silence et décide d'écrire une centaine de lettres qui s'adressent au roi, à l'Union Européenne, à la Ligue des droits de l'homme et à Charles Michel en personne. Elle ira même jusqu'à déposer plainte à la Commission européenne. Une plainte classée sans suite. Et pour que ces personnes ne tombent pas dans l'oubli, elle va créer une liste ; des noms réels trouvés sur un site listant les femmes mortes en Belgique. Sa mission tourne à l'obsession dévorante...En Belgique, une femme est tuée tous les huit jours. En France, tous les trois jours.Les féminicides et les violences conjugales et familiales existent partout dans le monde sous différentes formes. Selon l'ONU, une femme sur trois dans le monde aurait subi des violences physiques ou sexuelles une fois dans sa vie, 200 millions de femmes ont subi des mutilations génitales féminines, 71% de toutes les victimes de la traite des êtres humains dans le monde sont des femmes et des filles. Et une femme sur deux dans le monde a été tuée par son partenaire.C'est en 1992 qu'apparaît pour la première fois le terme de féminicide, dans le livre de Diana Russel Féminicide, the politics of women killing. Mais il faudra attendre plusieurs années pour faire exister ce concept et le combattre. Un terme qui s'est fait connaître de l'Amérique Latine jusqu'à nous, par Marcela Lagarde, une Mexicaine à l'initiative d'une commission spéciale du Parlement au Mexique en 2003. Suivront ensuite en 2015, des manifestations en Argentine où plus de 300.000 personnes ont défilés dans la rue. Elles ont pour slogan " ni una menos " (pas une de moins) qui fait référence au poème de la Mexicaine Suzana Chavez, assassinée en 2011 en raison de son combat contre les meurtres des femmes à Ciudad Juarez.La loi Lizin votée en 1998 pénalise les violences conjugales et met l'accent sur la problématique sociétale. Presque 20 ans plus tard, en 2016, la Belgique ratifie la convention d'Istanbul, un texte du Conseil de l'Europe. Notre pays est tenu de mettre en application les " 4 P " : la prévention, la prise en charge, la poursuite et les politiques intégrées. " Or, le pays est en infraction à ce niveau, car trop peu de choses sont faites par rapport aux obligations. Et rien ne semble bouger énormément dans notre pays malgré les faits récurrents ", soutient Sylvie Lausberg, présidente du Conseil des femmes francophones de Belgique : " Il existe différents types de féminicides. L'OMS en définit quatre : les meurtres par conjoint, les meurtres d'honneur, ceux liés à la dote et les viols suivis de meurtres par des non partenaires. Dans notre pays, la majorité sont des femmes tuées par leur mari, leur compagnon ou ex-compagnon, souvent dans le cadre d'une rupture. Nous n'avons pas de chiffres officiels dans notre pays, car la Belgique ne remplit pas l'obligation de l'article 11 de la Convention, qui demande des statistiques ventilées par sexe sur toutes les formes de violences."" Les conséquences de ces violences coûtent énormément à la société, en vies humaines brisées mais aussi sur le plan budgétaire. Des centaines de millions d'euros sont dépensés en justice, en santé ou encore dans le monde du travail où les conséquences des violences envers les femmes se chiffrent à 288 millions d'euros par an1. Il faut de la prévention avant tout. Nous devons absolument travailler sur le PAN (Le plan d'action nationale de lutte contre toutes les formes de violence basée sur le genre). Le nouveau plan 2020-2025 prévoit un budget sur cinq ans, mais nous n'avons pas encore d'évaluation du plan précédent... Il est plus que temps de mettre en oeuvre des politiques concertées et volontaristes, et pas seulement au niveau francophone où le dossier est pris à bras le corps en conférence interministérielle. C'est un problème national ! Nous ne pouvons pas éradiquer totalement le féminicide, mais nous pouvons le réduire car ce phénomène est inadmissible. "Le PAN reprend des objectifs qui mettent en pratique la Convention d'Istanbul. Certaines mesures ont été concrétisées, comme le renforcement d'une ligne téléphonique " Écoute violences conjugales " ouverte 24h/24 (0800 30 030, mais qui bascule sur la ligne générale des urgences après les heures de bureau...) et une autre pour les violences sexuelles ainsi que quelques maisons d'accueil spécialisées2. Cependant, rien n'est dit sur le budget consacré aux objectifs." La première ligne a un rôle à jouer dans la détection et l'aide bien évidemment ", ajoute Sylvie Lausberg. " Il existe plusieurs organismes qui proposent d'ailleurs des formations pour le corps médical, comme la SSMG ou le collectif contre les violences familiales et l'exclusion. "