Un monde sans cancer. Un monde sans pandémies. Un monde où la réponse aux effets du changement climatique serait des plus rapides. Et encore un monde où tout cela serait garanti à tous les organismes (humains, animaux, végétaux). On ne vous plante pas le décor utopique de la prochaine série Netflix de "hard science fiction", mais on s'en rapproche. Ce monde sans aucune maladie, c'est la vision de Seegene, biotech majeure basée en Corée du Sud. On soulèvera, au passage, le gouffre avec son voisin du Nord en termes de projet pour l'avenir du monde.

Seegene voit grand, très grand, sans pour autant que l'on puisse juger qu'elle a les yeux plus grands que le ventre. Car elle semble se donner les moyens de ses ambitions. Lors d'un événement hébergé sur le campus de l'éditeur Springer Nature à Londres, son fondateur et CEO, le Dr Jong Yoon Chun, a dévoilé la stratégie qui mènera, selon lui, à cette victoire de taille.

Depuis l'an 2000, le core business de Seegene se situe dans la fourniture de kits et d'instruments diagnostiques. En amont, elle développe et manufacture des kits de réactifs syndromiques qPCR (ou PCR quantitative, une méthode de réaction en chaîne par polymérase qui permet de mesurer la quantité initiale d'ADN). En aval, elle met au point et commercialise des systèmes automatiques optimisés pour l'analyse de ces kits qPCR.

Multiplex

Là où Seegene se distingue de ses concurrents, c'est par sa technologie de testing qui permet d'analyser jusqu'à 15 cibles dans un seul tube d'échantillon prélevé (en réalité, 14 pathogènes différents, puisqu'un "slot" doit être réservé au contrôle interne, comme sur les tests covid). Pour repère, la technologie classique de test qPCR ne permet aujourd'hui que de tester au maximum quatre cibles dans un seul tube. Cela ne permet de réaliser que des tests ciblés par pathogènes précis.

Le "multiplexage" que parvient à réaliser Seegene est une capacité très recherchée car elle permet de réduire le nombre d'échantillons, les coûts et le temps de travail nécessaires pour obtenir des résultats complets. "Tester jusqu'à 14 pathogènes différents en un seul tube permet de réaliser des tests non plus ciblés, mais syndromiques", explique le Dr Chun. Par exemple, en cas de syndrome respiratoire, le test qPCR de Seegene inclut 73 oligonucléotides qui permettront de détecter, dans le même échantillon, neuf pathogènes différents: le covid-19 (gène N/S et gène RdRP du SARS-CoV-2), la grippe A, la grippe B, le RSV, le métapneumovirus (MPV), l'adénovirus (AdV), le rhinovirus (HRV), les virus para-influenza (PIV) et le virus de la grippe C. Avec le même raisonnement, dans le cas des papillomavirus, Seegene peut tester 14 types de HPV grâce à 66 oligonucléotides en un seul tube, là où la technologie conventionnelle de qPCR nécessite cinq tubes (à raison de trois pathogènes + le test interne dans chaque tube).

Une comparaison entre la technologie conventionnelle de test qPCR (à gauche) et la technologie de test qPCR syndromique de Seegene (à droite) pour un test syndromique respiratoire et pour un test syndromique de papillomavirus., Seegene Inc.
Une comparaison entre la technologie conventionnelle de test qPCR (à gauche) et la technologie de test qPCR syndromique de Seegene (à droite) pour un test syndromique respiratoire et pour un test syndromique de papillomavirus. © Seegene Inc.

Cette capacité, propre à Seegene, ne suffira cependant pas à éradiquer les maladies sur Terre. La biotech coréenne possède d'autres technologies qui participeront à un monde sans maladies. On citera notamment SG In-Silico, outil automatisé de design oligo, qui permet de mettre au point n'importe quel test qPCR personnalisé, et un instrument modulaire type pour tout type d'analyse qPCR. Beaucoup de technologies, mais qui, dans les mains de Seegene seule, n'auront pas l'impact mondial qu'ambitionne son fondateur.

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Le Dr Chun l'a bien compris. C'est pourquoi une importante composante de la stratégie dévoilée ce mois-ci implique que Seegene va partager ses technologies avec les biotechs leaders à travers le monde. On ne parle évidemment pas de partage désintéressé ni de renoncement de propriété intellectuelle, mais bien de partenariats que Seegene vise à conclure avec une entreprise majeure dans chaque pays (appelez-la une "NewCo") de sorte à bâtir un réseau à l'échelle mondiale sans précédent (le "Global OneSystem Network").

Des packages Seegene à travers le monde

Le deal proposé par Seegene sera le suivant. Seegene fournira des OneSystem Packages à la NewCo. Cela inclura les technologies et l'expertise de Seegene nécessaires pour le développement, les essais cliniques, les approbations réglementaires, la manufacture et la vente de produits qPCR. La NewCo aura l'exclusivité du OneSystem dans son pays. Elle pourra profiter du réseau mondial de Seegene pour exporter ses propres produits, et pour l'import et la vente de produits plus globaux (sans taxes).

Deux partenariats de ce type ont déjà été conclus. Le premier s'est fait avec Hylabs, première compagnie biotechnologique et de diagnostic en Israël. Le second a été noué avec Werfen, première compagnie de diagnostic en Espagne.

Tripartite Washington-Londres-Séoul

La biotech sud-coréenne s'est encore entichée de deux alliés de poids. Une entente avec l'éditeur germano-britannique Springer Nature lui permettra de communiquer efficacement avec l'ensemble de la communauté scientifique. Ensuite, ce n'est ni plus ni moins que Microsoft qui a rejoint la partie. La firme de Bill Gates mettra à sa disposition ses dernières technologies d'intelligence artificielle. Microsoft Fabric, par exemple, lui permettra d'unifier toutes les données récoltées par Seegene et de les exploiter avec le plein potentiel du deep learning for big data. Le but ultime de la biotech sud-coréenne est de prédire les épidémies lors des premiers symptômes et de les enrayer directement.

De gauche à droite : Marc Spenlé, COO de Springer Nature ; le Dr Jong-Yoon Chun, CEO et fondateur de Seegene ; Elena Bonfiglioli, vice-présidente de Global Business Leader Healthcare, Pharma and Life Science chez Microsoft., Seegene
De gauche à droite : Marc Spenlé, COO de Springer Nature ; le Dr Jong-Yoon Chun, CEO et fondateur de Seegene ; Elena Bonfiglioli, vice-présidente de Global Business Leader Healthcare, Pharma and Life Science chez Microsoft. © Seegene

En fournissant sa technologie de qPCR multiplex, à l'échelle mondiale, à des entreprises nationales qui pourront, elles, adapter les produits de diagnostic à des besoins locaux spécifiques, Seegene entame donc une petite révolution globale en matière de diagnostic. "Vivre dans un monde sans aucune maladie peut sembler impossible, mais on peut y arriver grâce au diagnostic précoce", soutient le Dr Chun. "C'est inatteignable par les efforts de ma seule compagnie, mais c'est réalisable si des produits de diagnostic sont développés pour toutes les maladies par des experts et des scientifiques du monde entier, fournis par des entreprises leaders et utilisés pour le diagnostic précoce et la prévention. Grâce à ces efforts collectifs, un monde sans maladie n'est plus un rêve..."

Un monde sans cancer. Un monde sans pandémies. Un monde où la réponse aux effets du changement climatique serait des plus rapides. Et encore un monde où tout cela serait garanti à tous les organismes (humains, animaux, végétaux). On ne vous plante pas le décor utopique de la prochaine série Netflix de "hard science fiction", mais on s'en rapproche. Ce monde sans aucune maladie, c'est la vision de Seegene, biotech majeure basée en Corée du Sud. On soulèvera, au passage, le gouffre avec son voisin du Nord en termes de projet pour l'avenir du monde. Seegene voit grand, très grand, sans pour autant que l'on puisse juger qu'elle a les yeux plus grands que le ventre. Car elle semble se donner les moyens de ses ambitions. Lors d'un événement hébergé sur le campus de l'éditeur Springer Nature à Londres, son fondateur et CEO, le Dr Jong Yoon Chun, a dévoilé la stratégie qui mènera, selon lui, à cette victoire de taille. Depuis l'an 2000, le core business de Seegene se situe dans la fourniture de kits et d'instruments diagnostiques. En amont, elle développe et manufacture des kits de réactifs syndromiques qPCR (ou PCR quantitative, une méthode de réaction en chaîne par polymérase qui permet de mesurer la quantité initiale d'ADN). En aval, elle met au point et commercialise des systèmes automatiques optimisés pour l'analyse de ces kits qPCR. Là où Seegene se distingue de ses concurrents, c'est par sa technologie de testing qui permet d'analyser jusqu'à 15 cibles dans un seul tube d'échantillon prélevé (en réalité, 14 pathogènes différents, puisqu'un "slot" doit être réservé au contrôle interne, comme sur les tests covid). Pour repère, la technologie classique de test qPCR ne permet aujourd'hui que de tester au maximum quatre cibles dans un seul tube. Cela ne permet de réaliser que des tests ciblés par pathogènes précis. Le "multiplexage" que parvient à réaliser Seegene est une capacité très recherchée car elle permet de réduire le nombre d'échantillons, les coûts et le temps de travail nécessaires pour obtenir des résultats complets. "Tester jusqu'à 14 pathogènes différents en un seul tube permet de réaliser des tests non plus ciblés, mais syndromiques", explique le Dr Chun. Par exemple, en cas de syndrome respiratoire, le test qPCR de Seegene inclut 73 oligonucléotides qui permettront de détecter, dans le même échantillon, neuf pathogènes différents: le covid-19 (gène N/S et gène RdRP du SARS-CoV-2), la grippe A, la grippe B, le RSV, le métapneumovirus (MPV), l'adénovirus (AdV), le rhinovirus (HRV), les virus para-influenza (PIV) et le virus de la grippe C. Avec le même raisonnement, dans le cas des papillomavirus, Seegene peut tester 14 types de HPV grâce à 66 oligonucléotides en un seul tube, là où la technologie conventionnelle de qPCR nécessite cinq tubes (à raison de trois pathogènes + le test interne dans chaque tube).Cette capacité, propre à Seegene, ne suffira cependant pas à éradiquer les maladies sur Terre. La biotech coréenne possède d'autres technologies qui participeront à un monde sans maladies. On citera notamment SG In-Silico, outil automatisé de design oligo, qui permet de mettre au point n'importe quel test qPCR personnalisé, et un instrument modulaire type pour tout type d'analyse qPCR. Beaucoup de technologies, mais qui, dans les mains de Seegene seule, n'auront pas l'impact mondial qu'ambitionne son fondateur.Le Dr Chun l'a bien compris. C'est pourquoi une importante composante de la stratégie dévoilée ce mois-ci implique que Seegene va partager ses technologies avec les biotechs leaders à travers le monde. On ne parle évidemment pas de partage désintéressé ni de renoncement de propriété intellectuelle, mais bien de partenariats que Seegene vise à conclure avec une entreprise majeure dans chaque pays (appelez-la une "NewCo") de sorte à bâtir un réseau à l'échelle mondiale sans précédent (le "Global OneSystem Network"). Le deal proposé par Seegene sera le suivant. Seegene fournira des OneSystem Packages à la NewCo. Cela inclura les technologies et l'expertise de Seegene nécessaires pour le développement, les essais cliniques, les approbations réglementaires, la manufacture et la vente de produits qPCR. La NewCo aura l'exclusivité du OneSystem dans son pays. Elle pourra profiter du réseau mondial de Seegene pour exporter ses propres produits, et pour l'import et la vente de produits plus globaux (sans taxes). Deux partenariats de ce type ont déjà été conclus. Le premier s'est fait avec Hylabs, première compagnie biotechnologique et de diagnostic en Israël. Le second a été noué avec Werfen, première compagnie de diagnostic en Espagne. La biotech sud-coréenne s'est encore entichée de deux alliés de poids. Une entente avec l'éditeur germano-britannique Springer Nature lui permettra de communiquer efficacement avec l'ensemble de la communauté scientifique. Ensuite, ce n'est ni plus ni moins que Microsoft qui a rejoint la partie. La firme de Bill Gates mettra à sa disposition ses dernières technologies d'intelligence artificielle. Microsoft Fabric, par exemple, lui permettra d'unifier toutes les données récoltées par Seegene et de les exploiter avec le plein potentiel du deep learning for big data. Le but ultime de la biotech sud-coréenne est de prédire les épidémies lors des premiers symptômes et de les enrayer directement.En fournissant sa technologie de qPCR multiplex, à l'échelle mondiale, à des entreprises nationales qui pourront, elles, adapter les produits de diagnostic à des besoins locaux spécifiques, Seegene entame donc une petite révolution globale en matière de diagnostic. "Vivre dans un monde sans aucune maladie peut sembler impossible, mais on peut y arriver grâce au diagnostic précoce", soutient le Dr Chun. "C'est inatteignable par les efforts de ma seule compagnie, mais c'est réalisable si des produits de diagnostic sont développés pour toutes les maladies par des experts et des scientifiques du monde entier, fournis par des entreprises leaders et utilisés pour le diagnostic précoce et la prévention. Grâce à ces efforts collectifs, un monde sans maladie n'est plus un rêve..."