Le 2 juin dernier, le 14e symposium de l'Aframeco abordait la question délicate du discernement du patient.
...
"Aborder le sujet du discernement, c'est parler d'une autonomie décisionnelle, en termes de capacité à décider pour soi-même", entamait le Pr César Meuris, docteur en histoire et philosophie des sciences et responsable du Centre de recherche et formation continue Ressort de la Haute École Robert Schuman à Libramont. "Le consentement n'est pas l'autonomie, mais c'est sa principale modalité d'expression dans le secteur des soins." La capacité à consentir reposerait sur quatre piliers: l'habilité à comprendre, l'habilité à apprécier, l'habilité à raisonner et l'habilité à choisir. César Meuris souhaite y ajouter une cinquième: l'habilité à pouvoir en rendre compte. Conception un peu mise à mal, à son grand regret: "Pour pouvoir être respecté dans son autonomie, il faut pouvoir faire preuve d'un peu de capacité, donc s'inscrire dans une certaine normalité (de raisonnement, d'expression...). Si une personne ne sait pas faire ça, est-ce pour autant qu'elle n'est pas autonome?", interroge le chercheur. C'est ici qu'intervient une distinction importante. Pour l'orateur, il faut distinguer capacité cognitive et capacité décisionnelle. "Ce n'est pas la même chose. Pour autant, c'est souvent le cas dans les usages courants en pratique." La différence fondamentale consiste à ne pas assimiler la capacité à pouvoir faire des choix, d'une part, et celle de pouvoir mettre ces choix en oeuvre dans des discours réfléchis, d'autre part. Le professeur propose l'exemple d'une personne qui n'a pas la capacité d'exprimer quel jour on est: ce n'est pas pour autant qu'elle n'a pas de volonté de poser certains choix qui lui semblent essentiels. "Ce pouvoir de vouloir quelque chose, pour des raisons probablement très bonnes, ce n'est pas la même chose que de pouvoir les exprimer selon des capacités cognitives 'normales'. On ne peut pas réduire intellectuellement les capacités cognitives aux capacités décisionnelles", insiste le Pr Meuris. Or, les professionnels de soins de proximité, dont les médecins, sont les personnes le plus souvent confrontées à cette question de l'autonomie. "La question émerge uniquement lorsqu'il y a un refus de soin, pas avant", regrette le chercheur. "Quand le patient est hospitalisé, le consentement n'est pas recherché car il y a urgence. Ensuite, un projet thérapeutique est mis en application. C'est uniquement lorsque le patient refuse ce projet que la question de l'autonomie se pose. La recevabilité du refus de soin peut facilement être discréditée. Si la personne n'a pas la capacité cognitive, le doute est permis. Or généralement, le doute profite à la vie. Cela débouche le plus souvent sur une présomption d'incompétence du patient." Conclusion de l'intervention du Pr Meuris: il faut favoriser les processus de réflexivité pour que l'autonomie puisse émerger et que les choix posés rencontrent ce qui importe au patient.