Le Modes a profité de sa dernière assemblée générale pour mettre en oeuvre, pour la première fois, le principe de présidence tournante que le syndicat a initié il y a un peu plus d'un an. C'est désormais Élisa Kottos, pédiatre au CHU St-Pierre, qui assure la présidence du Modes pour un an. L'occasion d'aborder l'avenir du syndicat avec l'intéressée, ainsi que son prédécesseur, le Dr Ahmed Goubella.
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Le journal du Médecin: Élisa Kottos, vous êtes, depuis juin, la présidente du Modes. Pouvez-vous nous expliquer comment s'est passée votre nomination? Dr Élisa Kottos: La présidence du Modes s'inscrit dans une tournante. Nous avons modifié le fonctionnement du syndicat il y a un peu plus d'un an, dans la volonté de le professionnaliser. Pour ce faire, nous nous sommes basés sur le modèle suisse du primus inter pares (littéralement "premier parmi les pairs" en latin, cette locution désigne une personne qui préside une assemblée sans avoir de pouvoirs propres, NdlR): je serai la figure du Modes pour l'année à venir, mais au sein du Conseil d'administration, tout le monde travaille ensemble. C'est dans cet esprit que s'insère la présidence tournante. Je suis une des plus jeunes recrues du Modes. Mon titre peut faire croire à une ascension fulgurante, mais en réalité, c'est la continuité de l'engagement au Modes. Malgré le principe de primus inter pares, avez-vous la volonté de donner une couleur particulière à votre mandat? Élisa Kottos: Je pense que l'orientation du Modes a toujours été claire, et je m'inscris dans la continuité. En tant que présidente, un de mes objectifs est de rester engagée et d'être l'image de notre engagement, de véhiculer nos valeurs. Nous gardons la volonté de représenter des médecins au niveau des instances politiques de manière tout à fait indépendante. Je voudrais cependant profiter de mon jeune âge pour souligner la nécessité que tous les médecins, des assistants aux résidents chefs de service, s'investissent dans le syndicalisme médical. Le syndicalisme médical, c'est eux. Il faut s'y intéresser. J'estime déjà que je m'y suis intéressée un peu tard, c'est un de mes regrets. M'investir au Modes m'a vraiment beaucoup aidée. Et cet investissement est à la portée de tout le monde. C'est le message que je veux communiquer. Au-delà, nous continuerons d'aller sur le terrain, nous allons continuer les cafés débats et nous préparons d'autres surprises pour l'année à venir. Sans rentrer dans les clichés, au-delà de la volonté d'inclure les jeunes, votre volonté est-elle aussi de montrer qu'en tant que médecin et jeune mère de famille, il est possible de s'investir dans le syndicalisme? Élisa Kottos: C'est un enjeu d'une manière générale, il faut au minimum que la réalité de la profession soit représentée. Pour que les choses changent, il faut expliquer aux médecins la situation: il existe trois syndicats représentatifs en Belgique francophone qui ont une influence sur le débat public. Ils doivent poser un choix en fonction de leurs valeurs pour que la représentation ait un poids significatif. L'objectif final est bien sûr d'améliorer la pratique de la médecine et le système de soins. Je tiens d'ailleurs à rappeler nos valeurs et nos combats: améliorer la situation des post-gradués (PG) et des médecins assistants candidats spécialistes (Macs) et suivre de près la réforme de la nomenclature et du paysage hospitalier. C'est ce qui va nous occuper dans les années à venir. À côté, nos principaux combats concernent la santé mentale (des soignants et des soignés), le vieillissement de la population et la durabilité climatique dans nos pratiques. L'objectif est de considérer la santé avec une vision holistique, d'avoir un système de soins prenant en compte à la fois le préventif et le curatif. Ce sont les causes qui nous tiennent à coeur. Celles et ceux qui souhaitent s'engager pour ces causes sont les bienvenus pour nous rejoindre. "Engagez-vous!", que ce soit chez-nous, ou ailleurs. C'est le message que l'on veut faire passer. Il faut que le plus possible de médecins s'engagent. Ahmed Goubella, vous quittez la présidence du Modes et vous êtes, depuis peu, le nouveau médecin chef du site d'Ath et le directeur médical adjoint d'Epicura. Quel rôle allez-vous endosser au sein du Modes? Dr Ahmed Goubella: D'une manière générale, je vais prendre du recul. Je reste un cotisant du Modes et je continue à soutenir la cause du syndicat. Je serai actif, mais à un autre niveau. Je serai attentif au futur des réseaux, à la réforme de la nomenclature notamment. Je vais agir, mais à une autre fonction et donc différemment. Est-ce que cela veut dire que c'est un départ définitif du syndicalisme? Ahmed Goubella: Je ne peux pas répondre. Tout ce que je peux dire est que je vais prendre du recul. Élisa Kottos: Ahmed reste un soutien important. Il ne s'agit pas d'un abandon, mais d'une transition. On peut facilement l'appeler si l'on a des questions. Ahmed Goubella: J'ai l'impression de partir le devoir accompli. Je tiens d'ailleurs à souligner que je suis très fier de laisser la maison entre les mains d'Élisa. Je sais qu'elle sera très bien tenue. Et qu'elle va même évoluer dans le bon sens. Était-il difficile pour vous de choisir entre le syndicalisme et vos nouvelles fonctions? Ahmed Goubella: Je n'ai pas à être triste ou heureux de la situation. Je pense que, comme le dit l'expression: qui trop embrasse mal étreint. Cela ne sert à rien de jouer les cumulards. Si je veux mener à bien une mission, je dois m'y atteler pleinement. On peut être président de 36 associations, mais est-ce que cela a du sens? Si cela est pour ajouter une gommette de plus au tableau, cela ne sert à rien. Si j'endosse une nouvelle fonction, je dois la remplir à fond. C'est comme cela que je fonctionne. Ici, j'ai un nouveau défi à relever. C'est un très beau défi qui m'est offert et que je vais essayer de mener à bien. Cela prendra du temps, et c'est dans ce contexte que j'ai décidé d'abandonner certaines choses. Je fais un pas de côté par rapport au syndicalisme, mais j'ai également abandonné ma charge d'enseignant. Et je le vis très bien, parce que je donne un sens à mes actions. J'espère désormais pouvoir mener à bien les missions qui m'ont été confiées. Vous laissez derrière vous un bilan positif, avec notamment de bons résultats aux dernières élections médicales. Ahmed Goubella: Je suis ravi de deux choses: la première, c'est la participation des médecins qui a connu un boost. C'est donc mission accomplie pour l'ensemble des syndicats. La deuxième, c'est que le Modes s'est positionné comme une voie supplémentaire pour représenter les médecins spécialistes. Aujourd'hui, il y a une voie pour tout le monde, et c'est positif. Vous faites une passation de pouvoir au Modes, et le même phénomène s'est produit au GBO avec Lawrence Cuvelier qui a remplacé Paul de Munck il y a peu. Dr Goubella, un mot sur la relation que vous aviez avec ce dernier? Ahmed Goubella: Paul est bien plus qu'un collègue, c'est un ami. C'est quelqu'un de formidable et le GBO lui doit beaucoup. Il a une force syndicale en lui que l'on voit rarement. Je lui souhaite bon vent pour ses activités actuelles et futures dans la mesure où il reste un proche collaborateur du GBO encore aujourd'hui. Si j'ai un message à lui dire, c'est que ce fut une collaboration longue et fructueuse et que j'ai toujours eu du plaisir à travailler avec lui. C'est quand il veut pour aller boire un verre (rires). Un rapprochement du GBO et du Modes au sein du Cartel était mentionné au moment de la campagne des élections médicales. Avez-vous fait du chemin depuis? Ahmed Goubella: Nous restons sur l'idée de réformer le Cartel. Il est pour moi essentiel de rapprocher première et deuxième lignes. Nous devons mieux travailler ensemble, et des contacts ont été noués en ce sens au GBO et au Modes. Nous devons avancer sur la même lignée. Élisa Kottos: Le Cartel manque de visibilité. Il faut que les médecins comprennent qui nous sommes et à quelle structure ils s'adressent. Effectivement, il y a des réflexions sur des collaborations plus fortes entre spécialistes francophones et néerlandophones, mais aussi entre médecins francophones d'une manière générale. C'est une réflexion qui est en cours et qui aboutira probablement avant la fin de l'année.