Septembre rime avec rentrée académique. La saison 2024-2025 est particulière: l'UMons et l'UNamur proposent chacune un nouveau master en médecine. L'UNamur va plus loin et propose un master de spécialisation en médecine générale avec un focus sur la médecine rurale..
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Il aura fallu attendre longtemps, mais les cinq universités francophones proposent désormais un master en médecine. Pour être précis, l'UMons propose une codiplomation avec l'ULB tandis que l'UNamur s'allie avec l'UCLouvain pour codiplomer ses étudiants. L'objectif des deux nouveaux masters est notamment de pallier la pénurie de médecins généralistes dans les zones sensibles. Pour y arriver, l'Université de Namur a fait le pari de la ruralité. Via son master de spécilisation en médecine générale, l'université namuroise compte sensibiliser aux avantages et aux défis de la pratique en zone rurale identifiés par le tout nouvel Observatoire universitaire en médecine rurale. 20 à 30 étudiants sont attendus pour la rentrée, qui aura lieu durant la deuxième quinzaine de septembre. "On ne peut pas obliger les assistants en médecine générale à pratiquer ou avoir un maître de stage dans une zone rurale. Mais nos étudiants sont informés de notre spécificité et de notre tropisme", explique le Dr Dominique Henrion, directeur du programme de master de spécialisation en médecine générale à l'UNamur. "Ils savent que les séminaires locorégionaux se tiendront à Namur, mais aussi à Habay-la-Neuve. Nous allons donc loin pour que les étudiants en place dans des zones plus reculées n'aient pas trop de kilomètres à faire. Cela nous a déjà valu un petit retour d'une étudiante qui vient du Brabant wallon et qui devra faire davantage de kilomètres. Mais notre tropisme est connu: la médecine en zone rurale, et j'espère qu'il s'affinera d'année en année."Tout le cursus est organisé autour de la pratique en milieu rural. "Nous n'allons pas parler de vaches et de poules, mais nous allons aborder la ruralité, en filigrane, via toute une série de matières", résume le Dr Henrion, avant de détailler. "Toutes les matières d'un master de spécialisation en médecine générale 'classique' sont abordées, mais avec le prisme de la ruralité. Dans le module sur les urgences, par exemple, nous aborderons les gestes à réaliser avant l'arrivée du smur. Ce n'est pas la même chose d'attendre une ambulance ou un smur cinq minutes à Namur où il y a quatre hôpitaux ou à la campagne où il faut attendre 15 minutes voire une demi-heure. Pour chaque matière, il y a donc un éclairage spécifique."La volonté est de montrer aux étudiants que la pratique de la médecine générale en zone rurale peut être plus complète et plus variée qu'en ville. Elle peut comporter plus d'actes techniques (petite chirurgie, suivi de grossesse, pédiatrie générale...) avec moins de recours à la seconde ligne de soins et amener le praticien à jongler entre consultations et visites à domicile, avec les distances que cela comporte. "Je prends encore l'exemple de l'intensification du traitement antidiabétique: les médecins doivent être capables de se débrouiller de manière autonome. En province de Luxembourg, où il y a peu de diabétologues, le médecin généraliste ne peut se sentir impuissant face à un diabète qui dérape. Il faut qu'il fasse le taf."Ce changement de mentalité au sein du cursus de médecine de l'UNamur ne touche pas que le master de spécialisation et se fera sentir dès le bachelier. "Nous avons analysé le parcours de nos étudiants et nous avons constaté que trop peu d'assistants se retrouvent en zone de pénurie ou en zone rurale. Généralement, les étudiants de bac 3 choisissent de faire leur stage chez le médecin généraliste, proche de leur domicile, du domicile de leurs parents, ou de leur kot. Nous voulions modifier cela."Le département de médecine générale a donc posé la question aux étudiants: sont-ils favorables à un stage obligatoire en milieu rural? "89% ont répondu par l'affirmative. Un résultat totalement dingue." Pourquoi ne se sont-ils pas dirigés vers ce type de stage dès lors? "Très clairement, et c'est tout à fait intuitif, les deux freins majeurs qui sont identifiés, c'est le transport et le logement. Nous travaillons donc actuellement à nouer des partenariats avec les communes, afin de proposer aux étudiants des packages intéressants. La commune de Florennes, par exemple, va mettre à disposition un logement pour trois étudiants sous réserve. Une journée de sensibilisation sur les avantages de la région est également au programme. Tous ces partenariats devront d'abord être concrétisés avant de trouver des autres maîtres de stage ailleurs. Plusieurs communes ont déjà répondu présent."L'objectif est, année après année, d'inciter de plus en plus de jeunes médecins à s'installer en zone rurale ou en zone de pénurie. "On a parfois une fausse image de la ruralité", regrette Dominique Henrion. "Je plaide pour que l'on expose les étudiants à ce milieu qu'il faut démystifier. Il y a spécificités intéressantes, il faut pousser à découvrir ce monde." Des études de surveillance seront menées pour décider d'éventuelles adaptations au programme. L'UNamur est donc au début de l'histoire, avec la création de ce master, et non à l'aboutissement. "C'est un embryon", acquiesce le Dr Henrion. "Nous sommes une petite équipe, mais plutôt jeune et motivée. Nous avons plein d'idées qui germent, et on n'essaye pas de réinventer la roue. Nous nous appuyons sur le savoir de nos partenaires de l'UCLouvain qui ont de la bouteille et qui peuvent nous recadrer. Et pour l'heure, cela ne fonctionne pas trop mal. Nous avons confiance."