Le 56e cycle de perfectionnement en sciences hospitalières, organisé par la faculté de santé publique de l'UCLouvain, a abordé, vendredi dernier, l'épineux problème de la pénurie dans le secteur des soins. L'occasion pour Inge Neven, gestionnaire de projets au sein du cabinet Vandenbroucke, de partager la vision santé 2030 du Fédéral.
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Inge Neven se penche depuis quelques mois sur un projet afin d'établir une vision des soins de santé à l'horizon 2030, avec des actions à mener à court et moyen termes pour pallier cette situation de pénurie. "J'ai commencé ce travail en octobre. J'ai discuté avec 34 hôpitaux des problèmes actuels, des actions menées au sein des institutions, mais aussi les coupoles hospitalières, le SPF et d'autres acteurs des soins."Son constat est évident et connu: il y a énormément de pression, à l'heure actuelle, sur les équipes soignantes. "Il y a de la pression sur le personnel hospitalier, et peut-être encore plus sur le management hospitalier." La nouvelle collaboratrice du cabinet fédéral de la Santé souligne en outre que la perception de la qualité de soins diminue, au même titre que la satisfaction personnelle et l'épanouissement. "On constate de plus en plus d'absentéisme et de personnes qui quittent le secteur. Il y a un effet boule de neige pour le personnel qui reste, qui subit encore davantage de pression et qui s'épanouit de moins en moins." On notera par ailleurs que l'absentéisme dans le secteur des soins est plus élevé que dans d'autres secteurs, et est en augmentation. Inge Neven relève plusieurs causes à ce problème. "Il y a une tendance sociétale à ne pas sous-estimer, avec le vieillissement de la population, des travailleurs qui cherchent une meilleure qualité de vie, qui expriment davantage leurs besoins et une accélération de la digitalisation et des connaissances scientifiques. Il faut s'adapter, et ce n'est pas aisé.""Il y a aujourd'hui cinq travailleurs pour une personne pensionnée. Dans 20 ans, le ratio passera à deux travailleurs pour un pensionné. Il faudra demain soigner davantage de personnes, avec moins de personnel. Cela veut dire davantage de pression", ajoute la collaboratrice du cabinet Vandenbroucke. Le contexte belge, mêlant inflation et indexation automatique, augmente quant à lui la pression budgétaire. Les réformes, les normes d'agréments, le financement, les formations qui sont différentes des réalités du terrain, l'IFIC, les échelles de soins augmentent également la pression sur le système des soins. Il y a enfin des spécialités régionales, avec des étudiants qui étudient en Belgique mais partent vers la France, les Pays-Bas, le Luxembourg ou l'Allemagne. "Il faudrait faire un Tinder pour que ces personnes rencontrent des Belges et que l'on puisse les garder en Belgique", suggère avec humour la gestionnaire de projets. Y a-t-il réellement une pénurie de personnel? "En théorie non. Il devrait y avoir assez de personnel de soins aujourd'hui. Dans le futur, on s'attend - des études du KCE le démontrent - à une aggravation de la pénurie de médecins globalement, et d'infirmiers en Flandre."En pratique, il y a bel et bien pénurie d'infirmiers et de technologues. A l'avenir, en pratique, la pénurie va évidemment se faire davantage sentir. "Pour prévenir ce problème, il faut une réforme structurelle, complète.""Il faut réformer tout le système de soins en Belgique en ayant une vision claire. Il faut tout revoir, mais aussi donner le temps aux acteurs de terrain de s'adapter. Il faut être proactif et non réactif. Il faut équilibrer l'offre et la demande pour garantir l'accès aux soins de qualité à tout le monde", conseille Inge Neven. Concrètement, la gestionnaire de projets propose de rééquilibrer l'offre et la demande. "Faut-il laisser le choix au patient de faire tout ce qu'il veut? Il faut en tout cas travailler sur la prévention, travailler davantage les modèles de téléconsultations et de télémédecine." Au niveau de l'offre, Inge Neven croit fermement en les soins intégrés. Reste maintenant à poser des actes concrets pour le cabinet Vandenbroucke.